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histroire des couleurs au MA : utilisation, tabou, codes

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Message  Mayra faiseuse de Couleur Mer 12 Mar - 13:44

Les notes qui suivent ont été rédigées à partir de deux ouvrages de Michel Pastoureau ("Une histoire symbolique du Moyen Age "et "Jésus chez le teinturier").

La couleur : où, pourquoi, comment ?

Le Moyen age est très coloré et les couleurs sont utilisées dans des contextes ordinaires (vêtements, architecture) mais aussi parfois extraordinaires (aliments, pelages, plumages - chiens, faucons, chevaux - ). Toutes les couleurs ne se situent pas sur le même plan. Il existe ainsi des couleurs dites véritables : elles sont franches, lumineuses, saturées, solides, produisent de l’éclat et résistent. Ces couleurs sont présentes dans des contextes spécifiques (églises, palais royaux, palais de justice) ainsi que sur les vêtements. A contrario, il existe des couleurs peu saturées, ternes, peu résistantes.
A quoi sert la couleur ? Elle signale, souligne, classe, hiérarchise, oppose. Ainsi certaines couleurs sont interdites à telle ou telle catégorie sociale non seulement en raison de leur coloration trop voyante mais aussi à cause du caractère précieux de leurs colorants.Les riches et les puissants portent des couleurs vives obtenues avec des teintures de qualité tandis que les pauvres et les humbles ont des couleurs délavées, grisées à cause des teintures végétales de moindre prix. Les couleurs restent les mêmes mais leur qualité non. C’est dans cette différence que se trouve le plus grand écart chromatique au Moyen Age. Ainsi au XIIIième siècle, le bleu fané et le bleu franc ne constituent pas la même couleur. Un bleu dense et lumineux est souvent perçu comme plus proche d’un rouge, d’un jaune ou d’un vert que d’un bleu terne. La luminosité et de la densité priment sur la coloration.

Entre le XIIème siècle et le XIIIème siècle, la couleur est l’objet d’un nombre croissant d’écrits, surtout avec les travaux sur la lumière. L’organisation des couleurs est héritée directement du savoir aristotélicien (blanc - rouge - jaune - vert - bleu - soir). Parfois il y a le rajout d’une septième couleur, le violet, qui prend place entre le bleu et le noir. Ce système présente de grandes différences avec les principes de perception actuelles des couleurs. Deux exemples : l’opposition entre les couleurs froides et les couleurs chaudes n’est pas en vigueur au MA (le bleu est alors considéré comme une couleur chaude), la juxtaposition du rouge et du vert (la combinaison la plus courante dans les vêtements aristocratiques entre Charlemagne et le XIIème siècle) montre un contraste faible, voire un camaïeu pour l’œil médiéval. Pour le nôtre, c’est un contraste violent car il y a juxtaposition d’une couleur primaire et de sa complémentaire. Au contraire l’association du vert et du jaune, voisins dans le spectre, est pour nous peu contrastées, mais montre le contraste le plus brutal au Moyen Age.

Images du monde des teintures et des teinturiers
Au Moyen Age, la teinture relève de la ruse, de la tromperie, du déguisement ou de la magie. Elle est donc associée au Diable et entraîne un sentiment de méfiance, de peur, mais aussi d’admiration. C’est une réaction typique face à la transformation de la matière à laquelle se livrent les teinturiers, mais aussi le forgeron, l’alchimiste. " Il transforme la matière, la fait passer d’un statut à l’autre, change l’ordre des choses" en captant " per artificium les forces de la nature ".
Le mot infectur apparaît dès la fin du XII ième siècle et désigne à la fois la teinture et l’ordure, puis le terme infection est attesté au siècle suivant avec les mêmes significations. Il existe ainsi un caractère suspect, sinon réprouvé du métier de teinturier. Ceux-ci ont longtemps dépendu des épiciers et des apothicaires qui les approvisionnent en drogues et en matières colorantes. De plus une idée ancienne voulait que les activités en relation avec le fil, l’étoffe ou le vêtement soient par essence des activités féminines (influence de la Bible et de l’image d’Eve filant après l’expulsion du paradis).
On teint rarement le fil (sauf pour la soie) ou la laine en flocons. On teint presque toujours le drap tissé. Il faut une licence pour teindre dans une gamme de couleur, et on aboutit donc à une sorte de spécialisation en fonction de la couleur. Ainsi les teinturiers en bleu prennent en charge les tons verts, noirs, et les teinturiers de rouge, la gamme des jaunes.

Le tabou des mélanges
L’aversion pour les mélanges est héritée de la culture biblique. Mêler, brouiller, fusionner, amalgamer sont des opérations jugées infernales car elles enfreignent l’ordre et la nature des choses voulues par le créateur. Elles semblent tricher avec la matière. On ne mélange pas les couleurs, on juxtapose, on superpose.
Mélanger les matières colorantes est aussi tabou. Mélanger des teintures végétales, animales, minérales est très transgressif. L’interdit est hérité du Lévitique. On évite de fabriquer des étoffes en mélangeant des fibres végétales et des poils d’animaux. Une réalisation de ce type est le signe de pauvreté (fabrication de bure, de futaines, de tiretaines ordinaires) ou la volonté de mettre en avant le statut inférieur, marginal ou réprouvé.
Le bariolage sur un tissu est la marque de la souillure, marque infâmante. Il est de l’ordre du maculosum, du tacheté désagréable pour l’œil, scandaleux pour la société. Les hommes et les femmes éprouvent une véritable phobie des taches (peau ou pelage). Les malades sont mis au ban de la société, les animaux sont des créatures du diable (crapauds, dragons, frelon, guêpe, hyène, tigre, léopard). Seule la panthère est prise en bonne part car elle dégage une odeur merveilleuse qui chasse les dragons.
Il y a polychromie (notion négative) quand les couleurs sont posées sur le même plan, les unes à côté des autres et non empilées. Ainsi porter une chemise blanche, une tunique bleue, une robe rouge et un manteau vert ne constitue pas une tenue bigarrée.

La couleur et l’exclusion
Il y a des marques imposées à des personnes par des règlements et des statuts (croix, rouelle, bande, écharpe, ruban, bonnet, gants, chaperon). Cinq couleurs apparaissent, seules ou en combinaison :
- rouge et blanc
- rouge et jaune
- blanc et noir : seuls ou en association désignent les misérables et les infirmes (les lépreux)
- rouge : les bourreaux et les prostituées
- jaune : les faussaires, les hérétiques et les Juifs. C’est la couleur qui a fini par s’imposer mais pendant longtemps on a prescrit le port de marques unies (rouges, blanches, certes, noires ou mi-parties, mi-coupées, ou écartelées jaunes et vertes, jaunes et rouges, rouges et blanches, blanches et noires).
- vert seul ou jaune et vert : musiciens, jongleurs, bouffons, fous.
- rouge/vert/jaune : combinaison trichrome la plus voyante qui exprime la polychromie (sens péjoratif au moyen age).
Ces combinaisons se présentent en parti, coupé, écartelé, fascé ou palé. Il existe des contre exemples : ainsi les prostituées sont en rouge en France (robe, aiguillette, écharpe, chaperon, manteau) mais à Londres, elles ont des vêtements rayés de plusieurs couleurs.
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Message  The old Ben Dim 4 Mai - 18:41

Je me suis permis d'éclaircir un peu ton post fort intéressant Wink .
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